jeudi 5 septembre 2019

Seule la mer s'en souviendra d'Isabelle Autissier

Cette nuit, sans m'en rendre compte, je suis déjà parti, je suis entré en solitude. 

1968.
Père de famille et entrepreneur visionnaire, Peter March souhaite révolutionner le monde de la voile avec l'introduction de la technologie et de l'informatique à bord. Afin de démontrer l'efficacité de ses appareils et redynamiser son entreprise, il s'inscrit à la course en solitaire, autour du monde et sans escale, organisée et sponsorisée par le Sunday Times Golden Globe en 1968. Une course assez "libre" en termes de bateaux- chacun équipe le bateau qu'il veut, comme il le souhaite - et de départ - avec toutefois une date limite. Deux prix à la clé, celui du premier arrivé et celui du plus rapide.
Peter March fait construire et affréter un trimaran en un temps record, dernier concurrent à se lancer dans la course.

Un récit à deux voix qui se font écho : celle d'Eva, la fille aînée de Peter qui avait 14 ans au moment de la course et qui, adulte, porte toujours une certaine culpabilité vis à vis de l'histoire de son père alors que la voix de celui-ci revient à travers son journal de bord.
Une aventure qui commence dans l'excitation des préparatif mais qui finira mal du fait de la pression insupportable, de l'épreuve de la mer, des problèmes matériels et de la folie qui gagne irrémédiablement le navigateur une fois seul en mer.   

Le roman est basé sur une histoire vraie, celle de Donald Crowhurst qui avait menti sur ses positions et dont la disparition avait défrayé la chronique en son temps. Isabelle Autissier rend bien la dimension humaine du personnage et confirme avec cette deuxième lecture ses qualités d'auteur combinant une parfaite maitrise du sujet et de la langue. On tourne les pages sans s'ennuyer, emporté par les flots et la folie de Peter, ému par le regard et les dilemmes de sa fille.

Extraits du texte :
La vie est un grand jeu. Nous avons des cartes dans les mains à la naissance, mais rien n'empêche de piocher dans le paquet, d'essayer de se mettre dans une autre peau. (...) il faut parfois inventer les règles au fur et à msure que l'on joue. Ce serait trop triste que tout soit déterminé à l'avance. Il faut tenter des expériences, on peut toujours y découvrir quelques clés inattendues de l'existence. 

Je me sens usé d'avoir bataillé contre les sceptiques et les jaloux, ceux qui n'ont jamais rien osé et que mon défi renvoie à leurs existences minables. 

Vivre autrement amène à penser autrement. 

Pour gagner, il faut d'abord s'imaginer gagnant. L'avantage du solitaire, c'est que je suis le seul à maîtriser l'information, qui, comme chacun sait, est à l'origine du pouvoir. 

Du même auteur :
L'amant de Patagonie

Voir aussi :
Moitessier, le long sillage d'un homme libre de Jean-Michel Barrault

Titre : Seule la mer s'en souviendra
Auteur : Isabelle Autissier
Première édition : 2009

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