Un jour, au moment de rendre les grâces au début d'un repas, Jaja saisi le missel de son père et le jette dans un geste de révolte sur la vitrine de sa mère : Kimbili, sa sœur d'un an sa cadette, raconte l'incident et l'origine de cette insubordination soudaine dans cette famille aisée d'Enunga...
Dans ce roman, la plume sûre et captivante de Chimamanda Ngozi Adichie nous transporte avec sensibilité et subtilité dans une famille placée sous le joug d'un père au visage multi-facettes : fondamentaliste catholique porté par une foi intransigeante, il se révéle à la fois généreux, rigoureux, droit et exigeant mais aussi brutalement sectaire et intolérant. Chef d'entreprise à la tête de plusieurs usines et du seul journal indépendant du pays capable de dénoncer les turpitudes gouvernementales, il régit sa famille strictement, avec des objectifs clairs : les enfants doivent être premiers de classe en suivant un emploi du temps extrêmement précis préparé par ses soins. Une discipline de fer qui va toutefois se fissurer lorsque les enfants sortent pour la première fois de leur environnement, accueillis chez leur Tatie Ifeoma et ses trois enfants, Obiora, Amaka et Chima. Ils débarquent comme deux extra-terrestres dans cette famille universitaire exubérante, ouverte, pleine de rires et d'amour, malgré les difficultés et l'exiguité de leur logement sur le campus de l'université de Nsuka. Petit à petit, les deux adolescents vont s'ouvrir et Kimbili sortir de sa timidité apparente qui touche au mutisme.
Des personnages très bien campés, dans toute leurs complexités et leurs ambiguïté ; des relations et des sentiments très bien rendus et analysés ; une histoire universelle dans le cadre du Nigéria qui apporte quelques informations sur le pays ; un très bon livre. Que ce soit Americana, l'autre moitié du soleil/ Half of a yellow sun ou nous sommes tous des féministes /We should all be feminists, je n'ai encore jamais été déçue par Chimamanda Ngozi Adichie : son écriture est toujours juste et prenante et elle sait raconter des histoires, une romancière de talent, une vraie valeur sûre.
Tirés du texte :
Le défi de Jaja me semblait à présent similaire aux hibiscus pourpres expérimentaux de Tante Ifeoma: rare, chargé des parfums de la liberté différente de celle que les foules agitant des feuilles vertes scandaient à Government Square après le coup d'état.
Une liberté d'être, de faire.
Elle parlait à la façon dont mange un oiseau, par petites quantités.
"Voici ce que les nôtres disent au Dieu Haut, le chukwu, dit Papa-Nnukwu. Donne-moi et la richesse et un enfant, mais si je dois choisir entre les deux, donne-moi un enfant parce que quand mon enfant grandira ma richesse fera de même."
Il y a des gens écrivit-elle une fois, qui pensent que nous ne pouvons pas nous gouverner nous-même parce que les rares fois où nous avons essayé, nous avons échoué, comme si ceux qui se gouvernent par eux-mêmes aujourd'hui y étaient arrivés du premier coup. C'est comme si l'ont disait à un bébé à quatre pattes qui essaie de se lever pour marcher, puis retombe sur son derrière, de rester où il est. Comme si les adultes qui lui passent devant n'avaient pas tous commencé à quatre pattes !
Titre original : Purple Hibiscus
Titre français : L'hibiscus pourpre
Auteur : Chimamanda Ngozi Adichie
Première édition : 2003
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