Au fin fond de la forêt canadienne, trois vieillards se sont retirés du monde pour vivre en paix et en liberté en attendant une mort qu'ils ne craignent pas.
Ted était un être brisé, Charlie un amoureux de la nature et Tom avait vécu tout ce qu'il est permis de vivre. Une journée après l'autre, ils ont vieilli ensemble, ils ont atteint le grand âge. Ils avaient laissé derrière eux une vie sur laquelle ils avaient fermé la porte. Aucune envie d'y revenir, aucune autre envie que se lever le matin avec le sentiment d'avoir une journée bien à eux et à personne qui trouve à y redire.
À eux trois, ils ont formé un compagnonnage qui avait assez d'ampleur et de distance pour permettre à chacun de se croire seul sur sa planète.
(...)
Ils s'amusaient d'être devenus si vieux, oubliés de tous, libres d'eux-mêmes.
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Le grand âge lui apparaissait comme l'ultime refuge de la liberté, là où on se défait de ses attaches et où on laisse son esprit aller là où il veut.
Dans leur isolement, ils sont épaulés par le gardien d'un hôtel fantôme et un cultivateur de marijuana. Un jour, ils voient débarquer une photographe qui est sur la trace des derniers survivants des "grands feux" qui ont dévasté les forêts canadiennes du début du 20ème siècle ... Un autre jour, ils recueillent Marie-Desneige qui va commencer à vivre avec eux, après une vie volée par un internement forcé ...
Il n'y a pas d'âge pour vivre ou pour aimer et le grand âge n'est pas une fatalité, ce livre en une magnifique allégorie. Des personnages un peu iconoclastes mais non moins merveilleux d'hommes des bois, des ermites et des "sages" qui n'en sont pas parce qu'ils sont avant tout des hommes avec un passé qui n'a plus vraiment d'importance, et qui veulent simplement profiter du temps qu'il leur reste, en pleine nature, sans qu'on leur dise quoi faire. Ils sont touchants, pleins de délicatesse et d'attentions pour la nouvelle pensionnaire qu'ils intègrent à leur groupe, des protagonistes riches de simplicité et de bienveillance, conscients de la mort qui les attend au bout du chemin. Outre sa dimension humaine, le récit permet de découvrir des éléments historiques intéressants sur ces "grands feux" avec, en guise de jeu de piste, un volet artistique imbibé de lumière et d'images du passé.
Et pour ne rien gâcher, le texte, magnifique, évocateur des grands espaces et d'une grande limpidité. Une plume québecoise qui va à l'essentiel et nous emporte en nous enveloppant dans le souffle puissant qu'elle créée, absolument superbe !
Un livre rare, marquant et inoubliable. Multi-primé, tellement bien mérité.
Titre original : Il pleuvait des oiseaux
Titre anglais : And the Birds Rained Down
Auteur : Jocelyne Saucier
Première édition : 2011
Prix Ringuet, prix France-Québec, le Prix des cinq continents de la Francophonie, Prix littéraire des collégiens, etc.
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