dimanche 10 février 2019

Et Nietzsche a pleuré / When Nietzsche Wept d'Irvin Yalom


(Nietzsche) Ce qui est immortel, c'est la vie, c'est cet instant. 
Il n'y a pas d'au-delà, ni de but vers lequel tendrait la vie, ni de jugement dernier, ni d'Apocalypse !
 L'instant présent existe pour toujours, et vous êtes votre seul unique public.
(...)
Vivez pleinement la vie ! 
L'horreur de la mort disparaît dès lors que l'on meurt en ayant vécu jusqu'au bout ! 
Si vous ne vivez pas au bon moment, alors vous ne mourrez jamais au bon moment non plus. 

Vienne, 1882, aux balbutiements de ce qui deviendra la psychanalyse, la rencontre fictive et romancée de plusieurs personnages tirés du réel : le Dr Breuer et Nietzsche et dans leur périphérie, d'autres figures comme Lou Salomé ou Sigmund Freud.

Le docteur Breuer est alors un éminant thérapeuthe reconnu par ses pairs. Il expérimente de nouvelles techniques avec ses patients, la mesmérisation (l'hypnose) ou la cure par la parole, notamment avec Anna O. dont le cas d'école servira plus tard à Freud dans le développement de ses théories (Dans ce livre, Breuer est le mentor de Freud qui n'est encore qu'apprenti médecin et un ami de la famille Breuer chez qui il déjeune régulièrement) .
Dans notre histoire, le Dr Breuer est solicité par Lou Salomé pour s'occuper - sans qu'il le sache - de Nietzsche, maladif et profondément déprimé après l'échec de leur "ménage à trois" avec Paul Rée. À l'époque, Nietzsche a déjà plusieurs publications à son actif (le gai savoir / Humain, trop humain) mais ce sont des ouvrages plutôt confidentiels et le philosophe n'est encore qu'un individu obscur et méconnu.
Après une première rencontre entre Breuer et Nietzsche, commence un jeu du chat et de la souris qui va conduire à un pacte entre le médecin et le philosophe dans lequel les rôles vont s'inverser puisque le médecin ne voit pas d'autre solution que de devenir à son tour le patient, se dévoiler pour amener l'autre à s'ouvrir à son tour. S'ensuivent une série d'échanges approfondis entre les deux hommes pour aller chercher au plus profond de leurs êtres ce qui laisse entrevoir les prémisses de la psychanalyse, le moi, l'insconscient ainsi que les bases des théories qui alimenteront l'ouvrage de référence de Nietzsche : "Ainsi parlait Zarathoustra".

J'avais été séduite par la plume d'Irvin Yalom avec le problème Spinoza et, une nouvelle fois, je me suis laissée emporter par cette rencontre entre le Dr Breuer et Nietzsche même si le livre n'a pas tout à fait la même fluidité, sans doute parce que le personnage de Nietzsche est plus tourmenté et moins sympathique que Spinoza.
C'est un roman à la fois facile/agréable à lire et ultra-dense en terme de contenu, riche d'enseignements. Le texte est vraiment très bien ficelé, sur tous les plans : crédibilité, remise dans le contexte historique de l'époque, psychologie approfondie des personnages, présentation et développement des idées sous-jacentes ... avec, en fin de roman, les "notes de l'auteur" qui permettent de récapituler et de dérouler le vrai du faux, le "ce qui aurait pu être" de ce qui a été.  

 (Gide) L'histoire est un roman qui a été; le roman est de l'histoire qui aurait pu être.

Une lecture qui donnerait presque envie d'aller aborder les grands philosophes directement dans leurs textes même si pour le moment, c'est plutôt Irvin Yalom qui m'intéresse. Je ne vais certainement pas en rester là avec cet auteur fascinant ... à suivre ! 

Titre français : Et Nietzsche a pleuré
Titre anglais : When Nietzsche wept
Auteur : Irvin Yalom
Première édition : 1992

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