mercredi 27 février 2019

Mille petits riens / Small Great Things de Jodi Picoult


États-Unis.
Ruth est infirmière-obstétrique depuis plus de vingt ans, une employée modèle, consciencieuse et  sans histoire, respectée de tous. Elle est veuve, son mari était un soldat mort en service en Aghanistan et elle est mère d'un garçon de 17 ans, brillant élève promis à un bel avenir.

Un beau matin, après sa prise de service, elle se voit déchargée des soins de Davis, un nouveau-né dans le dossier duquel a été ajouté un post-it indiquant "pas de personnel afro-américain". Dans la mesure où Ruth est la seule employée noire, la subtilité de l'énoncé est sans appel. Elle est choquée mais doit obéir aux ordres de sa hiérachie qui a cédé aux exigences des parent, Turk et Brittany, un couple de suprémacistes blancs.
Mais voilà, avant de quitter l'hopital, le nouveau-né décède après une opération de routine alors qu'il est resté quelques minutes sous la garde de Ruth. Dans cette triste affaire, elle est un bouc émissaire évident et facile pour les parents désespérés qui vont l'attaquer en justice et pour l'hopital qui ne la soutient pas. Du jour au lendemain, la vie bien rangée de Ruth est totalement bouleversée et c'est Kennedy, une jeune avocate idéaliste "qui ne voit pas la couleur", commis d'office, qui va assurer sa défense.
Oui mais, et si cette couleur politiquement incorrecte qu'on évite, il faudrait peut-être un peu mieux la voir parce que c'est justement le coeur du sujet ?

Mille petits riens, c'est le racisme ordinaire au quotidien, celui que ceux qui ne le vivent pas ne peuvent ni percevoir ni même concevoir, un sujet souvent minimisé mais auquel Jodi Picoult a prêté sa plume, avec sa perception et sa subtilité habituelles. Une histoire pour présenter et attaquer les préjugés à la racine, là où on ne les voit pas. Un récit ni tout noir ni tout blanc, dans lequel elle donne voix, tour à tour, à Ruth, l'infirmière attaquée en justice, à Turk, le père suprémaciste blanc et à Kennedy, l'avocate. Trois vies touchées par la mort d'un nourisson, trois vies qui basculent et sont transformées par cette histoire.
Un vrai sujet de société qui ronge l'Amérique en profondeur, mais qui, malheureusement, est aussi en grande partie transposable ailleurs.

C'est un roman qu'on ne lache pas parce que l'écriture est fluide et agréable à lire, les personnages attachants et/ou intéressants, l'histoire prenante et même si elle est parfois un tantinet mélodramatique (prévoir les mouchoirs !), on n'a qu'une envie, tourner les pages pour savoir où tout cela va nous mener.

Après My Sister's keeper/Ma vie pour la tienne, House Rules/À l'intérieur, Nineteen Minutes et maintenant Small Great Things/Mille petits riens, Jodi Picoult ne m'a encore jamais déçue. Ses romans sont des page-turners prenants et marquants qui ont tous laissé une trace dans ma mémoire, même longtemps après les avoir lus parce qu'ils traitent efficacement de sujets pas toujours évidents (La maladie, l'autisme, un tueur qui fait un massacre dans une école, le racisme ordinaire). Jodi Picoult ne cherche pas la facilité pour s'attaquer aux préjugées et aux clichés qu'elle traite avec justesse et sensibilité en essayant de multiplier les points de vues mais je ne peux malgré tout pas m'empêcher de garder une toute petite réserve parce qu'elle péche parfois par un excès de sentimentalité "à l'américaine", imprégnée d'un soupçon d'angélisme.  

Titre original : Small Great Things 
Titre français : Mille petits riens
Auteur : Jodi Picoult
Première édition : 2016         

dimanche 24 février 2019

21 Leçons pour le XXIe siècle / 21 Lessons for the 21st Century de Yuval Noah Harari


J'avais aimé Sapiens et Homo Deus en admirant la capacité de réflexion et de synthèse de l'auteur alors c'est sans aucun hésitation que je me suis jetée sur ce nouvel opus rédigé par Yuval Noah Harari, 21 leçons pour le XXIe siècle. Cette fois, le jeune historien ne développe pas une thèse sur l'histoire de l'humanité ou son avenir, il se concentre plutôt sur vingt et une questions du monde d'aujourd'hui en tentant d'y apporter ses réponses en allant au coeur des choses, en prenant parfois des risques, en relativisant et sans faux-semblant :

Pourquoi le modèle des démocraties libérales est-il en crise ? Comment expliquer l'invasion des "fake-news" ? Comment réguler la propriété des données ? L'humanité saura-t-elle surmonter ses deux plus grands défis, les questions écologiques et technologiques ? Comment l'individu peut-il  trouver une place et du sens dans le monde qui se profile ?

L'auteur développe des sujets liés aux civilisations, à l'Histoire, aux nationalismes, à l'immigration, aux religions, à la technologie, à l'ignorance, à la justice, etc. Une foultitude d'idées qui nous touchent tous, nous humains, et qui sont traités encore une fois avec brio pour alimenter une vraie pensée sur le monde et surtout, la place de l'individu en son sein. Une approche finalement assez philosophique pour aller à l'essence de l'être. 

Un auteur brillantissime à lire et à partager pour alimenter non seulement une réflexion personnelle mais aussi la discussion et le dialogue même si certaines idées sont sans doute dérangeantes pour ceux qui sont ancrés dans leurs certitudes.

Quelques "petits" extraits tirés d'un texte par ailleurs parfaitement documenté et étayé :

In a world deluged by irrelevant information, clarity is power.

Humans think in stories rather than in facts, numbers or equations, and the simpler the story, the better. 

Homo Sapiens is just not built for satisfaction. Human happiness depends less on objective conditions and more on our own expectations. Expectations, however, tend to adapt to conditions, including to the condition of other people. When things improve, expectations balloon, and consequently even dramatic improvements in conditions might leave us as dissatisfied as before. 

Feelings are not based on intuition, inspiration or freedom - they are based on calculation. 
(...) Feelings are thus not the opposite of rationality - they embody evolutionary rationality. 

Intelligence is the ability to solve problems. Consciousness is the ability to feel things such as pain, joy, love and anger. We tend to confuse the two because in humans and other mammals intelligence goes hand in hand with consciousness.

The race to obtain the data is already on, headed by data-giants such as Google, Facebook, Baidu and Tencent. So far, many of these giants seem to have adopted the business model of "attention merchants". They capture our attention by providing us with free information, services and entertainment, and they resell our attention to advertisers.(...) 
We aren't their customers - we are their product. (...)
Ordinary humans will find it very difficult to resist this process. At present, people are happy to give away their most valuable asset - their personal data - in exchange for free email services and funny cat videos. It is a bit like African and Native American tribes who unwittingly sold their entire countries to Europeans imperialists in exchange for colorful beads and cheap trinkets.  If, later on, ordinary people decide to try and block the flow of data, they might find it increasingly difficult, especially as they might come to rely on the network for all their decisions, and even for their healthcare and physical survival.

Human groups are defined more by the changes they undergo than by any continuity, but they nevertheless manage to create for themselves ancient identities thanks to their storytelling skills. 
(...) People often refuse to see these changes, especially when it comes to core political and religious values. We insist that our values are a precious legacy from ancient ancestors. Yet the only thing that allows us to say this, is that our ancestors are long dead, and cannot speak for themselves. 

The people we fight most often are our own family members. Identity is defined by conflicts and dilemmas more than by agreements.

Though gods can inspire us to act compassionately, religious faith is not a necessary condition for moral behaviour. (...) Every religion, ideology and creed has its shadow, no matter which creed you follow you should acknowledge your shadow and avoid the naïve reassurance that "it cannot happen to us". 

People rarely appreciate their ignorance, because they lock themselves inside an echo chamber of like-minded friends and self-confirming newsfeeds, where their beliefs are constantly reinforced and seldom challenged.

We now suffer from global problems, without having a global community (...) As a species, human prefer power to truth (...) One of the greatest fictions of all is to deny the complexity of the world, and think in absolute terms of pristine purity versus satanic evil. 

In truth, everything you will ever experience in life is within your own body and your own mind.

Du même auteur, voir aussi :

Titre anglais : 21 Lessons for the 21st Century
Titre français : 21 leçons pour le XXIe siècle
Auteur : Yuval Noah Harari
Première édition : 2108

vendredi 22 février 2019

Bangkok Haunts / Bangkok Psycho de John Burdett


La nouvelle enquête de Sonchaï Jitpleecheep tourne à l'obsession pour notre inspecteur mi-thaï mi-américain : la victime est Damrong, une prostituée dont il a été amoureux quatre ans plus tôt et qui vient le hanter la nuit en provoquant des rêves érotiques alors que près de lui, sa femme Chanya, enceinte, attend leur enfant, la réincarnation attendue de son ami disparu (voir le premier volume de la série, Bangkok 8).
La mort de Damrong a été filmé et la vidéo circule sous le manteau dans un cercle très fermé, montrant une victime consentante qui va se révéler une redoutable et ensorcelante manipulatrice dont l'objectif est d'obtenir vengeance de l'au-delà.

Pour retrouver la paix, Sonchaï n'a pas d'autre choix que d'élucider les tenants et aboutissants d'une affaire à la frontière du réel, dans un monde pourri par le pouvoir, le sexe, la drogue, les pratiques occultes, entre Bangkok et le mystérieux Cambodge. Un monde dans lequel il évolue comme un poisson dans l'eau de par ses origines, en électron libre incontrolable du fait de son aura bouddhique et de son incorruptibilité. 

Une série vraiment peu conventionnelle qui dévoile une Thaïlande aux codes complexes, bien loin des images de cartes postales dominantes dans l'imaginaire occidental ... même si tout ça n'est bien sûr que du roman ! 

Voir aussi :
Bangkok 8  / Volume 1 de la série Bangkok
Bangkok Tattoo / Volume 2 de la série Bangkok 

Titre original : Bangkok Haunts
Titre français : Bangkok Psycho
Troisième volume de la série Bangkok.
Auteur : John Burdett
Première édition : 2007

mardi 19 février 2019

Manifesto de Léonor de Recondo


Pour mourir libre, il faut vivre libre.
 
Dans ce "manifeste", Léonor de Recondo rend hommage à son père Felix dans l'atelier de dessin duquel elle répétait et prenait possession de son violon étant enfant. Elle raconte la toute dernière nuit passée à son chevet avec Cécile, la fille et la compagne partageant cette attente à l'hôpital, à guetter le dernier souffle du mourant.
Alors que le corps de Félix est encore là, son esprit vagabonde déjà ailleurs en se retournant sur la vie qui s'en va, faite d'épreuves et de résilience, portée par la solidarité familiale et la créativité.

Ton esprit se promène ailleurs, à l'ombre d'une forêt, et il cause à d'autres. 
Nous sommes dedans, tu es dehors. 

Dans l'alternance des chapitres, on ressent le poids de ce temps de passage avec l'opposition entre l'atmosphère pesante de la chambre où les femmes sont enfermées en huis clôt et l'esprit libéré du père qui se souvient : l'Espagne et la vie d'enfant au village, la guerre qui bouleverse tout, Guernica, l'exil, les oncles aux activités louches, le rejet de l'étranger, etc. Légère, la mémoire de Félix s'envole et croise celle d'Ernesto (Hemingway) qu'il a rencontré enfant et avec lequel il dialogue ; il y a aussi Martha, le très vieux sur l'arbre, le berger, ses enfants disparus ; ou encore la fabrication si particulière d'un violon pour Léonor qui a hérité de sa fibre créative.

 L'art se lie à la nature, à l'amour, à l'enfance, il s'y mêle parfois à s'y méprendre.

Un livre très personnel avec des réflexions sur la vie et la mort, dont la structure des chapitres semble suivre le même ralentissement que le souffle qui s'éteint doucement.

On meurt, c'est tout, et on agrandit l'âme de ceux qui nous aiment. On la dilate. 

J'ai souvent pensé à la chaîne que forment les femmes quand elles donnent la vie, génération après génération, une naissance, puis une autre, une vie qui pousse l'autre. 
Je pense maintenant à la chaîne des morts, allongés, respirant à peine, entourés pour les plus heureux, mains tenues. 
Et des années plus tard, la même main vieillie qui en tient une autre plus jeune. 
Le dernier contact là, dans la paume.

Avec Manifesto, on fait le lien avec rêves oubliés, dans lequel Léonor de Recondo évoque l'exil de la famille de son père qui avait dû fuir l'Espagne pour la France et, surtout, on retrouve avec toujours le même bonheur toute la douceur, la sensibilité, le tact et la musicalité de sa plume : comme une musique qui vous enveloppe et vous emporte, Léonor de Recondo joue sa partition avec le coeur et les émotions, en se livrant entièrement, soutenue par une parfaite maîtrise technique, sans faute.
Une vraie valeur sûre. 
 
Du même auteur, voir aussi :
Amours
Pietra Viva
Rêves oubliés
Point cardinal

Titre : Manifesto
Auteur : Leonor de Recondo
Première édition : 2019

dimanche 17 février 2019

100 ans de solitude / 100 years of solitude de Gabriel Garcia Marquez


Souvent qualifié de "chef-d'oeuvre" de la littérature par les critiques relativement unanimes, je me suis dit qu'il était temps d'ouvrir ces Cent ans de solitude de Gabriel Garcia Marquez.

Peut-être n'était-ce pas le bon moment mais je n'ai pas réussi du tout - mais alors pas du tout et c'est plutôt rare - à entrer dans cette histoire d'un village perdu d'Amérique de Sud créé par un couple consanguin dont on va suivre les descendants sur plusieurs générations. Des noms qui se ressemblent et finissent par se mélanger, des dérives parfois totalement loufoques et à la limite du fantastique, non vraiment, j'ai beau eu m'accrocher, j'ai rapidement perdu le fil et ma volonté de persévérer n'a pas aidé, amenuisant au contraire l'envie de tourner les pages.  

Alors j'ai reposé et mis de côté ce "monument" ... pas pour moi, pas maintenant ...

Titre français : 100 ans de solitude
Titre anglais : 100 years of solitude
Titre original (espagnol) : Cien años de soledad
Auteur : Gabriel Garcia Marquez 
Première édition : 1967

jeudi 14 février 2019

Bangkok Tattoo / Bangkok Tattoo de John Burdett


Nouvelle enquête de l'inspecteur Sonchaï Jitpleetcheep au coeur du district 8 de Bangkok avec le meurtre d'un agent de la CIA. Un mystère qui, au départ, n'en semble pas vraiment un puisque la criminelle serait Chanya, la prostituée vedette du club détenu et géré par la mère de Sonchaï, en association avec son supérieur, le colonel Vikorn. Appelé sur les lieux, celui-ci dicte immédiatement à Sonchaï le rapport de l'affaire telle qu'il l'imagine afin de dédouaner et préserver sa poule aux oeufs d'or qui ira se mettre au vert quelques temps, le temps que l'affaire se tasse.

Mais si l'imagination est une chose, la réalité en est une autre et Sonchaï va devoir résoudre les incohérences de cette histoire, en préservant les apparences, de Bangkok au sud de la Thaïlande où la présence musulmane a été mise sous surveillance américaine après les attentats du 11 septembre 2001. Une enquête menées dans un contexte personnel particulièrement sensible pour l'inspecteur qui en pince pour l'irrésistible Chanya.

Dans ce deuxième polar de la série "Bangkok" on retrouve avec plaisir tous les personages imaginés par John Burdett, à commencer par notre inspecteur incorruptible, à la botte de son supérieur, fervent bouddhiste, intermédiaire "entre deux mondes", l'orient et l'occident qu'il décripte à l'attention du lecteur "farang" (étranger) à qui il s'adresse en donnant des clés sur la culture locale ...
Les personnages secondaires sont tout aussi truculents : la mère tenancière et ancienne prostituée ; Vikorn, le chef de la police, traffiquant de haut vol, rival et concurrent du chef de l'armée ; Lek, le nouveau partenaire katoï (Ladyboy) de Sonchaï qui s'interroge sur la voie à prendre sur son genre ; etc.

Un polar plein d'humour et de dérision avec une façon pour le moins peu conventionnelle et peu cartésienne de traiter une enquête ... finalement, surtout un bon prétexte pour découvrir une autre culture et une certaine vision de la vie du district 8 de Bangkok.

Encore !

Voir aussi :
Bangkok 8 / Volume 1 de la série Bangkok

Titre original : Bangkok Tattoo 
Titre français : Bangkok Tattoo
Deuxième volume de la série "Bangkok"
Auteur : John Burdett
Première édition : 2006

mardi 12 février 2019

La sœur de la lune / The Moon Sister de Lucinda Riley


Petite lecture facile et sympathique mais non moins instructive, pour s'aérer la tête, The Moon Sister est le cinquième volume de la saga des sept soeurs d'Aplièse adoptées à travers le monde par le mystérieux Pa Salt.

Ce roman commence comme les précédents, le moment où l'héroïne apprend la mort de son père adoptif. Cette fois, il s'agit de Tiggy, la soeur à la santé fragile et à la sensibilité exacerbée qui la rend proche des êtres et des animaux dont elle s'occupe. Nous la découvrons d'abord au fin fond de l'écosse où elle mène une mission de protection et de réintroduction à la vie sauvage d'une espèce de chats menacée. La piste de son histoire personnelle la conduira aux villages troglodites du sud de l'Espagne vers une famille gitane habitée par la musique et le flamenco, exterminée et/ou éparpillée au moment des périodes sombres de la guerre civile ... 

Consistante, très sentimentale, pas compliquée, agréable à lire, une série qui fait voyager à travers le monde et l'histoire, qu'on dévore quand on est "tombé dedans" !

Deux tomes et encore au moins une soeur à découvrir avant de lever (on l'espère) le mystère de Pa Salt et celui de la septième soeur manquante, bref, envie de connaître la suite sans que ça s'arrête ! 

Mise à jour : décembre 2019

Titre anglais : The Moon Sister
Titre français : La sœur de la lune
Auteur : Lucinda Riley
Première édition : novembre 2018

dimanche 10 février 2019

Et Nietzsche a pleuré / When Nietzsche Wept d'Irvin Yalom


(Nietzsche) Ce qui est immortel, c'est la vie, c'est cet instant. 
Il n'y a pas d'au-delà, ni de but vers lequel tendrait la vie, ni de jugement dernier, ni d'Apocalypse !
 L'instant présent existe pour toujours, et vous êtes votre seul unique public.
(...)
Vivez pleinement la vie ! 
L'horreur de la mort disparaît dès lors que l'on meurt en ayant vécu jusqu'au bout ! 
Si vous ne vivez pas au bon moment, alors vous ne mourrez jamais au bon moment non plus. 

Vienne, 1882, aux balbutiements de ce qui deviendra la psychanalyse, la rencontre fictive et romancée de plusieurs personnages tirés du réel : le Dr Breuer et Nietzsche et dans leur périphérie, d'autres figures comme Lou Salomé ou Sigmund Freud.

Le docteur Breuer est alors un éminant thérapeuthe reconnu par ses pairs. Il expérimente de nouvelles techniques avec ses patients, la mesmérisation (l'hypnose) ou la cure par la parole, notamment avec Anna O. dont le cas d'école servira plus tard à Freud dans le développement de ses théories (Dans ce livre, Breuer est le mentor de Freud qui n'est encore qu'apprenti médecin et un ami de la famille Breuer chez qui il déjeune régulièrement) .
Dans notre histoire, le Dr Breuer est solicité par Lou Salomé pour s'occuper - sans qu'il le sache - de Nietzsche, maladif et profondément déprimé après l'échec de leur "ménage à trois" avec Paul Rée. À l'époque, Nietzsche a déjà plusieurs publications à son actif (le gai savoir / Humain, trop humain) mais ce sont des ouvrages plutôt confidentiels et le philosophe n'est encore qu'un individu obscur et méconnu.
Après une première rencontre entre Breuer et Nietzsche, commence un jeu du chat et de la souris qui va conduire à un pacte entre le médecin et le philosophe dans lequel les rôles vont s'inverser puisque le médecin ne voit pas d'autre solution que de devenir à son tour le patient, se dévoiler pour amener l'autre à s'ouvrir à son tour. S'ensuivent une série d'échanges approfondis entre les deux hommes pour aller chercher au plus profond de leurs êtres ce qui laisse entrevoir les prémisses de la psychanalyse, le moi, l'insconscient ainsi que les bases des théories qui alimenteront l'ouvrage de référence de Nietzsche : "Ainsi parlait Zarathoustra".

J'avais été séduite par la plume d'Irvin Yalom avec le problème Spinoza et, une nouvelle fois, je me suis laissée emporter par cette rencontre entre le Dr Breuer et Nietzsche même si le livre n'a pas tout à fait la même fluidité, sans doute parce que le personnage de Nietzsche est plus tourmenté et moins sympathique que Spinoza.
C'est un roman à la fois facile/agréable à lire et ultra-dense en terme de contenu, riche d'enseignements. Le texte est vraiment très bien ficelé, sur tous les plans : crédibilité, remise dans le contexte historique de l'époque, psychologie approfondie des personnages, présentation et développement des idées sous-jacentes ... avec, en fin de roman, les "notes de l'auteur" qui permettent de récapituler et de dérouler le vrai du faux, le "ce qui aurait pu être" de ce qui a été.  

 (Gide) L'histoire est un roman qui a été; le roman est de l'histoire qui aurait pu être.

Une lecture qui donnerait presque envie d'aller aborder les grands philosophes directement dans leurs textes même si pour le moment, c'est plutôt Irvin Yalom qui m'intéresse. Je ne vais certainement pas en rester là avec cet auteur fascinant ... à suivre ! 

Titre français : Et Nietzsche a pleuré
Titre anglais : When Nietzsche wept
Auteur : Irvin Yalom
Première édition : 1992

samedi 9 février 2019

Mourir n'est pas de mise de David Hennebelle


Pour eux, les Marquisiens, la vie était existence, elle ne se surchargeait pas du poids de l'avenir.

Biographie romancée des trois dernières années de la vie du chanteur Jacques Brel qui, au début des années 1970, au sommet de la gloire, préfère l'appel de la mer, les voyages sur son voilier, la recherche de l'anonymat et une installation aux Marquises où, rongé par la maladie, il crée son dernier album ...

Une histoire qu'on connait déjà plus ou moins quand on appartient à la génération qui a vu disparaitre ce personnage légendaire mais qu'on apprécie pour le souffle de liberté qu'elle apporte et la façon simple, pudique, poétique et presque joyeuse dont elle est traitée.

C'est léger, doux et chaleureux comme les alizés qui semblent nous envelopper lorsqu'on se plonge dans cette petite douceur littéraire. Il suffit de se laisser porter pour être gagné par l'appel du large et le bonheur de vivre, tout simplement !

Merci pour cette bouffée d'air frais Émilie qui a envie de partager les livres ! 

Titre original : Mourir n'est pas de mise
Auteur : David Hennebelle
Première édition : 2018

lundi 4 février 2019

Les 5 langages de l'amour / The 5 love languages de Gary Chapman


Dans cet essai très accessible, le psychologue Gary Chapman propose une sorte de mode d'emploi à l'attention de tous les couples qui veulent durer. Il explique, développe, s'appuie sur son expérience et illustre ses propos de quantité de cas qui l'ont amené à dresser une typologie des langages de l'amour, le secret étant de comprendre auquel chacun adhère de façon dominante et à faire l'effort de parler le langage de l'autre pour faire durer le couple.
Tout est presque dit dans le titre avec ces cinq langages de l'amour : les paroles valorisantes, la qualité du temps partagé, les cadeaux, les services rendus et/ou les contacts physiques ... ce n'est pas très compliqué et yapluka !     

Un livre qui semble construit sur beaucoup d'évidences reposant sur nombre d'exemples concrets qui résonnent auprès des partenaires du couple. Un texte qui permet de discuter et de comprendre certains frottements qui peuvent perturber une relation mais qu'il est facile de corriger quand on en appréhende la cause.

Un peu comme les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus de John Grey, ce bouquin s'ajoute aux indispensables qu'il faudrait presque imposer à tous les couples !
À mettre entre toutes les mains, qu'il s'agisse de jeunes ou de vieux couples !

Titre original : The 5 love languages
Titre français : Les 5 langages de l'amour
Auteur : Gary Chapman
Première édition : 1992