lundi 29 janvier 2018

Pactum Salis d'Olivier Bourdeaut


À la trentaine passée et après des années à trainer à Paris sans très bien savoir quoi faire de sa vie, Jean s'est finalement trouvé une vocation de paludier dans les marais salants de la presqu'île de Guérande où il mène une vie monacale, en retrait du monde.
De son côté, Mickael qui s'est rebaptisé Michel pour des besoins de respectabilité, s'est totalement investi dans sa profession d'agent immobilier au flair infaillible, avançant de Nantes à Paris et d'un poste d'employé provincial à celui d'entrepreneur sans scrupule ; pour la première fois depuis qu'il a commencé à travailler dix ans auparavant, ce personnage m'as-tu-vu et on ne peut plus flamboyant s'offre des vacances à la Baule.
Le temps d'un été, les chemins de ces deux hommes que tout sépare, sinon l'âge et la solitude, vont se croiser et se méler de façon détonante alors que la découverte d'un cadavre émaille ce récit d'une touche d'intrigue ...

C'est parce que j'avais bien aimé En attendant Bojangles, son premier livre, que je me suis plongée sans hésitation dans Pactum Salis d'Olivier Bourdeaut ... mais l'impression que j'en tire est cette fois moins tranchée et plus mitigée, avec du très bon et des aspects plus déroutants.
Côté positif, l'écriture magnifique, évocatrice, drôle et créative avec laquelle l'auteur semble jouer en maitrisant parfaitement mots et expressions sans que jamais ce soit artificiel. Autre réussite, le choix du décor, celui des marais salants admirablement évoqués - nécessitant parfois le recours au dictionnaire, mais ce n'est pas un mal.
Bref, un écrin avec tout ce qu'il faut pour servir une histoire que j'ai trouvée un peu "too much" / "trop". En soi, l'idée du scénario est excellente mais le choix narratif est d'en faire une caricature à tous les niveaux, celui des personnages, de leurs histoires respectives, des sentiments, des relations ou encore des situations explosives, imprévues et aux retournements constants entre les deux hommes. Au final, la crédibilité s'en ressent pour produire une histoire totalement déjantée, un peu inclassable, oscillant entre amitié improbable et grosse comédie burlesque marquée d'un zeste de polar.

Somme toute, facile à lire et à prendre comme un vaudeville moderne, inattendu et déconcertant mais pas inintéressant, porté par des qualités d'écriture indéniables et un cadre majestueux.

Titre : Pactum Salis
Auteur : Olivier Bourdeaut
Première édition : janvier 2018

Tiré du livre :
- Suivant la distance et les lunettes qu'on chausse pour y repenser, les moments de grâce et de ridicule sont souvent interchangeables. 
- On ne se lie pas d'amitié avec un fantasme, on le regarde, l'observe, l'envie, le jalouse, on l'étudie à distance mais on se garde bien de le lui montrer. 
- Ses parents avaient pratiqué à merveille l'oxymore d'une présence aussi pesante qu'une absence. 
- En somme ! vous dîtes "en somme" jeune homme, c'est très bien ! (...) Désormais les gens pour résumer leur pensée ne disent plus "au fond, en somme ou tout compte fait" mais ils disent "en gros". Cela peut vous sembler dérisoire mais pour moi, voyez-vous, c'est le symbole d'un monde qui s'écroule. Avant nous donnions le fond de notre pensée, les comptes de nos réflexions, désormais les gens donnent le gros de celles-ci. 
- La conversation est une guerre de nuances et ce sont souvent les seules batailles que je remporte.    

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