dimanche 12 novembre 2017

Article 353 du code pénal de Tanguy Viel


Après avoir jeté et abandonné à la mer le promoteur immobilier Antoine Lazenec, Martial Kermeur est arrêté et déféré devant un juge d'instruction à qui il confie son histoire et ce qui l'a amené à ce geste extrême. Une histoire somme toute banale, celle d'un ouvrier spécialisé licencié des arsenaux de Brest qui vivote en attendant une prime de licenciement confortable, ancien conseiller municipal de gauche, bien dans sa presqu'île et avec ses concitoyens, divorcé assurant la garde de son fils Erwan et dont la vie bascule avec l'arrivée d'un promoteur immobilier véreux, manipulateur de haut vol, qui le piège comme tant d'autres avec le miroir aux allouettes d'un projet immobilier promettant de faire de leur petit coin de Bretagne une "Nouvelle St Tropez". Un récit qui amène petit à petit au geste fatal présenté en ouverture du livre et surtout à la conclusion, ce fameux article 353 mis en avant par le juge mais qu'il ne faut pas dévoiler pour garder le suspense  ... 

Le livre est bien écrit, relativement court et il peut se dévorer presque d'une traite. Ceci dit, une fois refermé, je reste un peu dubitative et presque mal à l'aise, tout ça pour ça !
Évidemment, on compatit au récit de Martial exposé avec beaucoup de calme et de détachement ainsi qu'un certain fatalisme, après tout il sait ce qui l'attend et ne demande qu'à pouvoir raconter les choses à sa façon, alea jacta est... 
... mais une fois digérée, je trouve l'histoire presque trop carricaturale, convenue et bien pensante même si elle cherche peut-être à adresser des questions plus larges de société sous couvert d'un simple roman noir. Finalement, c'est une sorte de reprise dépoussiérée de l'histoire du pot de terre contre le pot de fer, du méchant promoteur vereux contre le bon ouvrier naïf, de l'argent facile contre le pain si durement gagné, de l'exploitation des masses par l'avide et sournois profiteur capitaliste ...  Le personnage du promoteur, particulièrement cynique, est limite surréaliste et je ne parlerai pas du juge ni de la pirouette finale ...
 ... seulement de l'unique interrogation valable après une telle lecture : la victimisation - aussi réelle et profonde soit-elle - peut-elle justifier de se rendre justice soi-même ?

Nota : au moins, on apprend quelques chose avec cet article 353 ... mais sa portée est tout de même assez troublante et je ne peux m'empêcher de le mettre en relation avec une autre lecture récente (la Serpe de Philippe Jaenada) dans laquelle pèse le poids du juge d'instruction détenteur d'une certaine toute puissance inquiétante ( ... comprendra qui pourra ...).      

Titre : Article 353 du code pénal
Auteur : Tanguy Viel
Première édition : 01/2017
Grand Prix RTL-Lire 2017

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